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Le drame est tout frais, je me dois de vous en faire part (pas de mariage).
Ce matin, alors que je mettais à profit une partie de mon temps de trajet pour accentuer mon regard (enjôleur) d’un trait de crayon discret, quelle ne fut pas ma stupeur de constater dans mon petit miroir de poche, qu’un cheveu brun* s’était installé sur un côté de ma tête.
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Rendez-vous compte ? Dans ma superbe crinière blonde, j’ai déniché un squatteur carrément brun ! Oh l’outrage ! Oh le mécréant ! Comment est-ce possible ? J’en appelle à la science et à Jean-Louis David, comment ce fesse, euh, ce fait-ce ? D’où sort-il ? Pourquoi moi ? Y’en a-t-il d'autres ?
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Vous pouvez aisément imaginer mon trouble et les questions qui fusaient de toutes parts, créant l’embrouillamini dans ma p’tite tête blonde (enfin plus totalement).
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Immédiatement, j’ai sorti mon Opinel et tranché le poil sacrilège. D’un coup, j’ai bien vu dans le regard des voyageurs stupéfaits qu’ils partageaient mon indignation. À moins que ce ne soit la vue d’une blondinette sortant tout de go, une lame de son sac pour l’approcher de son crâne… nobody knows…
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Tiens, toi aussi, ami lecteur, je te sens perplexe. Pourtant, il faut bien comprendre que je ne pouvais décemment laisser cette excentricité capillaire me défigurer de la sorte.
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Ah ! C’est pour la lame aiguisée que tu t’inquiètes ? Pas de panique, j’applique juste un principe paternel simple : « avoir toujours sur soi, sa bite et son couteau ». Bon, pour la bistouquette, je sais qu’il me sera possible d’emprunter celle d’un mâle qui passe. Par contre, allez tenter de demander un canif (même Suisse) à un inconnu, vous vous heurterez à une fin de non-recevoir. Déjà parce que c’est très personnel (ça ne se prête pas, contrairement aux bijoux de famille), et aussi parce que les gens sont très peu équipés (en schlass, pas en « service trois pièces », faut suivre un peu !).
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Non, croyez-moi, c’était la solution la plus raisonnable. Je n’allais pas me mettre à faire une teinture blonde pour camoufler un poil récalcitrant. Il eût été possible de peroxyder le malappris, mais cela allait à l’encontre de mon principe du « tout naturel, tout d’origine » que je prône et défends au péril de ma vie, comme vous le constatez en ces lignes.
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Il faut bien avouer que mon anti racisme trouve ici ses limites. Le noir n’a pas sa place dans ma chevelure, je ne peux le tolérer et c’est pourquoi j’ai dû procéder à la peine capitale (exécutable sur le champ) de peur qu’il se reproduise et ne finisse par coloniser ma touffe du haut.
Oui, j’ai été encore plus radicale que Le Pen et plus rapide que Sarkozy, mais il ne pouvait en être autrement.
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Je ne suis pas de celles qui passent chez le coloriste comme on va chez le boulanger et ne suis pas psychologiquement préparée à quitter ma « blonde attitude ».
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Je sais, c’est cruel, mais il faut faire des choix dans la vie, alors j’ai tranché dans le vif.
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Sister « bien dégagée derrière les oreilles »
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* Oui, j’ai bien dit brun, car je suis beaucoup trop jeune pour avoir à me soucier de l’arrivée (quasi inévitable dans le futur) de cheveux blancs.