Ce soir, j’étais dans le train de 22h14 au départ de Gare du Nord, le wagon est au ¾ plein et rien que sur mon niveau, on doit être une bonne soixantaine. Même si ce n’est pas très politiquement correct, les faits sont là et je constate que sur cette masse hétéroclite, c’est que nous ne sommes que 3 « gaulois ». Oui, c’est comme ça qu’on nous surnomme en banlieue, enfin, quand ce n’est pas les « bâtards de Français ». Etrange quand on sait que la très grande majorité de ceux qui nous balancent ça le sont aussi et que leurs parents ont peut-être bataillé ferme pour obtenir cette fameuse carte d’identité. Arf, faut croire qu’ils ont la mémoire courte ou les idées un peu étroites.
Un Pakistanais (ou Sri Lankais) s’assoit en face de moi, reluque ma jupe, mes jambes et se croit autorisé à me faire du pied. Je lui lance un regard noir en me tournant de l’autre côté. Il recommence en me lançant un gros clin d’œil lourdingue.
« Bon maintenant vous arrêtez de suite ou je vous en colle une ! » lui dis-je en armant mon poing en sa direction.
Il s’écarte en bafouillant qu’il a un peu bu, que ce n’est pas méchant et pourtant continue ses grosses œillades salaces en avançant sa main vers mon genou.
« Si vous faites ça, c’est à coups de couteau que ça va se régler maintenant » lui lancé-je avec la mâchoire serrée et le ton déterminé et ferme d’un Chuck Norris près à passer à l’attaque.
Il relève alors les mains en l’air comme si j’étais flic et dis à son pote allongé sur l’autre banquette qu’il n’a jamais vu ça une femme prête à se battre et qu’il est étonné de ma réaction. Il attrape son casque de moto (pourquoi se baladait-il avec ça dans le train ?) et fait mine de vouloir l’enfiler pour se protéger de mes menaces.
Je continue à le fusiller du regard, sans me démonter, pendant qu’il grommelle et finalement se lève pour descendre à sa station. Il recule en me gratifiant d’une révérence ridicule en se moquant ouvertement de moi.
Sur la bonne quinzaine de mecs blacks autour de nous, pas un seul n’a bronché, comme d’hab’. Bienvenue dans le 9-3 ! Ici c’est la technique du « rien à foutre » total, chacun pour sa gueule, Dieu, Allah et Vishnou pour tous. Ici la galanterie, les bonnes manières, c’est pas leur business, la notion de protection de la veuve et de l’orphelin, d’acte chevaleresque envers la femme menacée, ça leur passe loin au dessus.
Le type ne s’attendait vraiment pas à ma réaction en reluquant mon décolleté sage, mes petits talons et mon air placide. Seulement il ne savait pas que je zone sur cette ligne depuis plus de 20 piges et que chez moi, les avertissements, il est préférable de les prendre au sérieux sinon j’avoine vite, très vite !
Une fois, j’étais étudiante, je bossais sur mes bouquins dans un train de cette fichue ligne, un mec monte, attrape mon sac et ressort en courant. Sauf que je suis sortie avec lui et lui ai couru après. J’ai réussi à accrocher mon sac, l’ai fait lâcher prise, il a continué à s’enfuir pendant que tout le contenu se répandait sur le quai. Le chef de train a vu la scène, m’a entendu gueuler après le voleur, il n’a pas attendu un instant que je remonte, a fermé les portes et le train s’est barré, sans moi...
Et si le jeune s’était retourné, m’avait cogné ? Hé bien il y avait non assistance à personne en danger, refus de porter secours, voire complicité d’agression. Le principe du « rien à foutre » avait déjà fonctionné à plein, avec un type ayant toute autorité pourtant ! Bravo, bel esprit d’entraide. Je m’en suis remise, mais je n’ai jamais oublié et ne regrette pas mon attitude. J’ai ma fierté.
Mes amis, mes collègues ou ma famille trouvent que c’est de l’inconscience de ma part. Je prône au contraire la nécessité de ne pas se laisser gagner par la peur, sinon ce sont eux qui auront remporté la partie et feront régner un régime de terreur. C’est malheureusement à cause de ce laxisme qu’il existe encore des zones de non-droit dans les cités, ils ont tout pouvoir, le savent et en abusent. Même les pompiers et les médecins ne s'y déplacent plus pour éviter les "caillassages".
Après on pourra toujours m’accuser de racisme, je m’en tamponne, c’est la connerie que je ne supporte pas, quelle que soit son origine ethnique. Sur tous les continents, y’aura toujours des connards pour faire chier les autres et contre ce fléau de la bêtise humaine, de l'envie de nuire, je n’ai aucune patience.
Pour info, il y a quelques années, une fille s’est fait violer en pleine après-midi, dans ma gare et personne n’est intervenu non plus. Voilà pourquoi je ne tolère rien, même « pour rigoler ». Et voilà aussi pourquoi je n’arrêterai pas de vivre, de prendre le train que je veux, à l’heure qui me plait, mais s’il faut se battre, je me battrai, sans peur, sans haine. Juste parce qu’il le faut, pour se faire respecter.
Sister « en mode kaïra »