Objectif : acheter un autoradio.
Armes disponibles :
- ma bagnole (j’avais pensé la laisser au garage mais sans savoir pourquoi, mon 6ème sens m’en a dissuadé, c’est bien foutu la nature)
- ma carte bleue (qui va passer au vert dès qu’elle aura reçu le signal magique : « valide »)
- mes desiderata et toutes mes considérations esthétiques, acoustiques et techniques (oui, mon niveau sur ce point est peut-être moyen mais je fais confiance à mes oreilles)
Cible : les dealers de musique en univers confiné de catégorie auto-tracté par moteur thermique goulûment alimenté de diesel puant, polluant, ruinant.
Lieu d’attaque : la zone commerciale la plus proche. J’ai repéré les points stratégiques qui feront l’objet de mon assal (euh non assaut) commercial. Mon indic, un certain « pages jaunes » m’a balancé tout son ses contacts sans broncher. J’ai les noms et le reste, ça va chauffer !
Ma première cible est en vue, je tente une approche sobre, profil bas, j’veux pas être repérée dès la première visite.
Le magasin est un modèle de repaire pour mâles en quête d’équipement. Tout est fait pour ne pas les dépayser, un joyeux bordel règne et les « forces de vente » sont vautrés sur des sièges pour ne pas intimider le chaland. Comme tout est étudié pour qu’un esprit masculin ait le moins d’effort à fournir, je trouve sans difficulté le rayon « son » (oui, ils n’ont pas mis « acoustique » parce ce mot compte 4 syllabes => trop fatiguant et compliqué). *
J’observe les articles, tente de chercher des détails sur les étiquettes qui, mis à part le prix, ne mentionnent quasiment que la marque. Rien concernant la puissance ou les spécificités du modèle.
Après avoir rodé quelques instants comme un guêpe autour d’un pot de confiture, je me dis que l’autre avachis va bien daigner bouger son royal séant pour me gratifier d’un « qu’est-ce qu’elle veut la p’tite dame ? » mais non, rien ne l’arrachera à son trône, il a dû « faire son chiffre » et ne voit pas l’intérêt de se casser le c.. pour quelques dollars de plus. Tant pis cow boy, je m’en vais comme un prince !
Volant en main, je fonds sur ma prochaine proie qui est coincée entre un dealer pour femme (comprendre magasin de chaussures) et une grande surface du microprocesseur et consort. Rideau de fer ! L’enseigne est toujours là mais porte close. Je cherche un panneau « fermé pour inventaire » ou une affichette mentionnant les horaires d’ouverture mais rien, juste le paravent métallique. OK, n’insistons pas, au moins j’aurais tenté.
Jamais deux sans trois, je fonce vers mon avant dernier rencard. Fastoche à trouver, parking tranquille, rayon bien fourni et même un vendeur disponible ! Tiens ? Aurais-je trouvé un paradis du consumérisme ?
Détails techniques, explications valables, précisions pertinentes. Vraiment, il ne me reste plus qu’à choisir. Quitte à tomber sur quelqu’un de sympa, j’en viens au point délicat : la désinstallation du modèle d’origine pour y mettre le nouveau. Il m’explique calmement qu’il peut le faire « pour me rendre service » mais pas ce soir parce qu’il est presque 19 h. et surtout parce qu’il est seul dans la surface de vente et ne peut abandonner son rayon. Je comprends, un peu déçue quand même. Alors il me propose de revenir samedi, où son collègue pourra assurer le relais. Décidément, efficace le gars ! Bon, vu que le magasin fermait, je n’ai pas pu obtenir l’objet de ma convoitise mais rendez-vous est pris pour samedi.
Il restait un établissement sur mes tablettes mais le timing était trop short. Faudra revenir. Sur leur site Internet, j’ai vu que c’était du lourd, une sorte de royaume du tuning et de la voiture de compétition. Va falloir la jouer fine pour ne pas passer pour une blonde de base.
J’irai voir, par acquis de conscience et histoire de comparer un peu les tarifs et ne pas me faire enfler (chose particulièrement agaçante) surtout en me faisant refiler un vieux clou au prix d’un neuf. N’empêche que ça va pas être facile de dire : « oui mais non, finalement le super Alpine machin à près de 1000 euros n’est pas tout à fait ce que je recherche, voyons plus modeste… » au risque de me faire envoyer paître comme une petite joueuse.
Ma préférence va nettement vers l’enseigne qui s’applique à faire son métier dans les règles de l’art et sans chichis. Ca semble dingue de se dire qu’on est content de trouver quelqu’un qui fait bien son boulot. Mine de rien, la concurrence est théoriquement rude quand 4 magasins sont situées à quelques kilomètres de distance mais finalement les mecs s’en foutent, si tu prends tant mieux sinon bof, ça ne changera rien pour eux.
Cette situation résume bien la France et reflète aussi ce qui interpelle les entrepreneurs ou clients étrangers quand ils voient le piètre accueil qu’ils reçoivent ici.
Reste que c’est toujours le monde du silence dans ma caisse et que ça à le don de me plomber le moral durant mes trajets. Alors j’ai tenté la panacée bidon, mon pauv’ vieux lecteur MP3 première génération (460 grammes au compteur) avec les mini-enceintes de mon PC greffées dessus et qui crachouillent péniblement la musique tant convoitée. Quand je croise des flics (oui attention d’ailleurs, ils sont de retour depuis que les mesures anti-confinement de volailles ont été levées et que les beaux jours reviennent) je planque l’installation discrètement, redoutant qu’ils ne la trouvent pas très aux normes ou je ne sais quel prétexte bidon pour faire chier le citoyen.
Ah, bien sûr si j’étais Paris Hilton, au moindre signe de défaillance de l’engin sonore à vocation automobile, j’aurai carrément changé la voiture et non juste l’équipement secondaire. Mais je ne suis pas cette brillante (par son gloss et ses lunettes et non par ses capacités intellectuelles) héritière d’un empire pour lequel elle n’aura jamais versé une goutte de sueur.
Voilà, y’a ceux qui claquent des doigts pour que tout leur tombe tout cuit dans l’bec et y’a les laborieux qui doivent perdre un temps précieux pour un résultat incertain. L’avantage est que moi j’apprécierai l’engin une fois en place alors qu’elle n’imagine même pas que ça puisse être livré sans la grosse limousine autour.
Sister « fly on the windscreen »
* Messieurs, vous aurez compris qu’il fallait passer en mode « humour on-line ». Si vous persistez à me trouver sexiste, alors regardez un peu les pubs destinées à célébrer la fête des mères et vous verrez que rien n’est sensé nous faire plus plaisir qu’un grille-pain ou un épilateur électrique… Si vous trouvez que ça n’est pas une preuve de machisme alors je rends mon tablier (et ma tenue de soubrette qui va avec).